En guise d’introduction aux quelques pages de ce site consacrées à l’interférométrie des tavelures, il est intéressant de se poser la question de la première observation du phénomène de Tavelures dans l’histoire des sciences.
La notion d’interférence appliquée dans le domaine de l’astronomie remonte à l’époque du 17ème siècle, avec un physicien totalement inconnu du nom d’Isaac Newton…….
Sir Isaac Newton, plus connu pour ses travaux sur la mécanique classique et la gravitation universelle, qu’il ennonça dans les « Philosophiæ Naturalis Principia Mathematica » en 1687, fût aussi connu pour ses travaux en optique grâce à ses études sur le sujet, commencées en 1666 et synthétisées dans un traité sur la lumière en 1704, sous le nom « Optiks, or a treatise of reflexions, refractions, inflections and colors of light ».
On peut lire sur le wikipédia consacré à Newton et son approche de l’optique la chose suivante : « Au cours de 1670 à 1672, Newton étudie la réfraction de la lumière, il démontre qu’un prisme décompose la lumière blanche en un spectre de couleurs, et qu’un objectif avec un deuxième prisme recompose le spectre multicolore en lumière blanche. C’est en 1666 qu’Isaac Newton fit ses premières expériences sur la lumière et sa décomposition. En 1704, il fit publier son traité Opticks, dans lequel est exposé sa théorie corpusculaire de la lumière, l’étude de la réfraction, la diffraction de la lumière et sa théorie des couleurs. Dans celui-ci, il démontre que la lumière blanche est formée de plusieurs couleurs et déclare qu’elle est composée de particules ou de corpuscules. De plus, il ajoute que lorsque celle-ci passe par un milieu plus dense, elle est réfractée par son accélération. À un autre endroit de son traité, il explique la diffraction de la lumière en l’associant à une onde. »C’est entre autre dans la première édition, que l’on peut retrouver la première version du « Télescope de Newton », décrit longuement dans l’ouvrage et dont le schéma se présente comme suis :
Malgré cela, si l’on regarde l’évolution de ce traité dans les années qui ont suivi, on peut s’apercevoir de l’évolution des commentaires, et ce à partir de la troisième édition datant de 1717 (la quatrième édition de cet ouvrage datant de 1730). En page 110 de la troisième édition de son oeuvre sur l’optique, on peut lire le commentaire suivant :
Newton, Optiks, 1704, Book One, part I, prop VII Theorem VI
« If the Theory of making telescopes could at length be fully brought into practice, yet there would be certain Bounds beyond which Telescopes could not perform. For the air through which look upon the Star, is in perpetual Tremor; as may be seen by tremulous Motion of shadows, cast from high towers; and by the twinckling of the fixed Stars. But these Stars do not twinckle when viewed through Telescopes which have some large aprtures. For the rays of light which pass through divers parts of the apertures, tremble each of them apart, and by means of their various and sometimes contrary tremors, fall at one and the same time upon different points in the bottom of the eyes, and their trembling motions are too quick and confused to be percieve severally. And all these illuminated points constitute one broad lucid point, composed of those many trembling points, confusedly and insensibly mixed with one another by very short and swift tremors, and thereby cause the star to be appear broader than it is, and without any trembling of the whole. Long Telescopes may cause objects to appear brighter and larger than short ones can do, but they cannot be so formed as to take away that confusion of the rays which arises from the tremors of the atmosphere. The only remedy is a most serene and quiet air, such as may perhaps be found on the top of the highest mountains above the grosser clouds. »
Traduction :
« Si la théorie de fabrication des télescopes peut à la longue être pleinement amenée dans la pratique, il y aura cependant certaines bornes au delà desquelles les télescopes ne seront plus efficaces. L’air par lequel nous regardons vers les étoiles, est en perpétuel tremblement; comme on peut le voir dans les timides mouvements des ombres, projeté depuis de hautes tours; et par le scintillement des étoiles fixes. Mais ces étoiles ne scintillent pas lorsque nous les voyons au travers de télescopes ayant de larges ouvertures. Pour les rayons de lumière qui passent au travers de diverses partie de l’ouverture, tremblant chacune séparément, et par le fait de leur variables et parfois de leurs tremblements contraires, chutent au même moment et sur différents points de l’arrière de l’oeil, et leurs mouvements de tremblements sont trop rapides et confus pour être perçus séparément. Et tout ces points illuminés constituent un large point lucide, composé de tous ces points tremblants, confusément et insensiblement mélangés les uns les autres par très courts et rapides tremblement, et par la même font apparaître l’étoile comme plus large qu’elle est, et sans aucun tremblements. Les long télescopes peuvent faire apparaître les objets plus brillants et plus larges que les petits peuvent le permettre, mais ils ne peuvent être fait pour évacuer cette confusion des rayons qui surgit de ces tremblements de l’atmosphère. Le seul remède est un air plus calme et serein comme celui qui peut peut-être trouvé au sommet des plus hautes montagnes au dessus des nuages bruts. »
Copie de la version de 1704 (bibliothèque de Stanford), le scan complet
Extrait :
Copie de la version de 1704 (bibliothèque de l’École Normale Supérieure de Paris (ULM)) :
Un grand merci à Philippe Jacquier, professeur à L’Université de Paris VI et chercheur au laboratoire Kastler Brossel, malheureusement disparu au cours de l’année 2018, qui connaissant ma passion pour le sujet, m’a signalé ces quelques lignes dont l’importance dans l’histoire des sciences constitue un tournant dans la compréhension des phénomènes liés à la lumière.
En résumé, Newton, au travers de ses observations, à rendu compte d’un phénomène dont l’interprétation n’a été correctement faite que 2 siècles plus tard par Antoine Labeyrie (en 1972). Le phénomène décrit ici est celui des tavelures (Speckles en anglais), dont l’explication physique aurait put conduire Sir Isaac à appréhender la nature de la lumière sous sa forme ondulatoire, et non corpusculaire.
On peut donc en conclure qu’a peu de choses près, ce génie du 17ème siècle, est passé a 2 doigt de la mécanique ondulatoire, autrement dit, la forme initiale de la mécanique quantique
Quelque part, à 2 siècles de distance, on peut rendre une fois de plus hommage à cet immense génie, qui à peu de chose près a touché du doigt les fondamentaux de la physique du 20ème siècle….. Isaac Newton fut donc le premier à décrire le phénomène des tavelures, sans pour autant en donner une interprétation physique.
Très humblement, ces quelques lignes sont inspirantes pour qui s’intéresse à la physique des phénomènes atmosphériques, et il faut le recul de deux siècles d’observations astronomiques pour se rendre compte de l’intérêt des constats expérimentaux de Newton. Son approche purement pragmatique a guidé ces quelques pages consacrées à l’utilisation des tavelures en astronomie moderne, pour l’amateur autant que pour les recherches professionnelles orientées dans cette voie.
Aussi est-il naturel de voir dans les quelques pages de ce site, une approche de la physique de la turbulence, dont Newton sépare les effets entre les « petits » et les « grands » télescopes, ainsi que sa vision de ce phénomène interprété deux siècles après ses recherches, comme une conséquence directe de l’interférence d’ondes lumineuses avec elles mêmes, pourtant sujettes à l’opposition entre la vision corpusculaire et la vision ondulatoire de la lumière, ce qui aurais pu le conduire a ouvrir en son temps un pan de la physique qui n’a été exploré que plusieurs décennies après sa mort.
Autant dire que ces quelques pages web consacrées à l’interférométrie, ne sont rien d’autre que quelques réflexions se reposant « sur l’épaules d’un géant » comme le dirait un chroniqueur scientifique d’une radio d’état, scientifique de grande renommée, et immense vulgarisateur qu’il n’est pas nécessaire de nommer ici.